Roland D'Ieteren, le sixième descendant d'une dynastie d'entreprises plus ancienne que la Belgique elle-même, nous a quitté la semaine dernière. Le discret magnat de l'automobile de 78 ans a succombé des conséquences d'une infection à la Covid-19, après plusieurs semaines d'hospitalisation. La famille D'Ieteren détient toujours 57,5 % des actions du groupe automobile éponyme, réparties sur deux holdings.
D'Ieteren est actif depuis plus de 200 ans
L'entreprise familiale, basée à Ixelles, a été fondée en 1805. À l'époque, la Belgique faisait encore partie de l'Empire français. Jean Joseph D'Ieteren installe alors un petit atelier près du centre de la capitale. La fourniture de roues à des carrossiers réputés de la région a été la première activité qui s'est rapidement transformée en fabrication de carrosses complets. Deux générations plus tard, en 1897, le carrossier D'Ieteren a livré la première carrosserie pour un véhicule automobile.
Au cours des décennies suivantes, le carrossier D'Ieteren a équipé d'une carrosserie le châssis de plus de 100 réalisations connues. Au total, 6.000 unités ont été assemblées, dont plus de 20 existent encore. Durant l'entre-deux-guerres, l'attention de D'Ieteren s'est déplacée de la construction de carrosseries de luxe vers l'importation de voitures et de camions américains. À cette fin, des activités d'assemblage ont également été lancées à Forest, où se trouve actuellement Audi Bruxelles.
C'est Pierre D'Ieteren, alors gestionnaire de la cinquième génération, qui, en 1948, a réussi à mettre le grappin sur la marque allemande VW et a ensuite été autorisé à importer la toute nouvelle Coccinelle. Cela marquait le début d'un partenariat avec le géant industriel allemand qui dure maintenant depuis plus de 70 ans. Deux ans plus tard, la société devient également l'importateur de Porsche, tandis que dans les années soixante, pour la première fois, elle se diversifie également et commence à proposer des assurances et des financements. Depuis 1974, D'Ieteren distribue également Audi dans notre pays.
Roland D'Ieteren élargit considérablement les activités du groupe
Roland D'Ieteren était âgé de 33 ans lorsqu'il succédait à son père, Pierre, décédé accidentellement en 1975. Il fera rapidement appel aux autres marques du groupe VW. Seat l'a rejoint en 1984, Skoda en 1992, Bentley en 2000 et Lamborghini en 2001. Aujourd'hui, D'Ieteren importe une voiture neuve sur cinq dans notre pays. Roland D'Ieteren a également su saisir d'autres opportunités. Il a investi dans la société de location de voitures Avis et dans Belron, la société mère de Carglass et Autoglass, et bien que sa participation dans les actions ait été considérablement réduite en 2018, elle reste une véritable manne dans le portefeuille de D'Ieteren. Roland D'Ieteren a quitté le conseil d'administration de la société il y trois ans à peine, au profit de son fils Nicolas. Il avait atteint l'âge maximum légal de 75 ans. D'Ieteren était déjà une entreprise milliardaire (son chiffre d'affaires en 2019 était de 3,8 milliards d'euros) et les actifs de Roland D'Ieteren étaient estimés à plus d'un milliard d'euros, en partie grâce à l'évolution favorable des taux de change de ces dernières années.
Un passionné dans l'âme
Si le parcours financier et commercial de l'homme d'affaires, anobli par le roi Albert II en 2009, est remarquable, le secteur automobile se souviendra surtout de Roland D'Ieteren comme d'un homme discret mais particulièrement passionné. Roland D'Ieteren était fasciné par l'automobile et son histoire. Il a été l'invité d'honneur de salons automobiles internationaux, de foires et d'événements historiques, tant en Belgique qu'à l'étranger. Roland D'Ieteren a constitué une très vaste et exceptionnelle collection de voitures personnelles et a entrepris des projets de restauration vastes et complexes. Le patron discret n'a jamais fermé les yeux sur des moyens de transport plus modestes. La collection éclectique de l'homme comprend des voitures de toutes sortes. Des Bugatti les plus exclusives aux plus modestes Golf.
En coulisses, Roland D'Ieteren a joué un rôle ces dernières années dans la revitalisation du musée automobile bruxellois Autoworld. Il s'est également impliqué personnellement dans la Carrozzeria Touring Superleggera et le fabricant de roues à rayons Borrani, entre autres. Deux entreprises historiquement importantes dans le secteur automobile dont l'existence serait sérieusement menacée sans son intervention. C'est à toute la communauté internationale des passionnés d'automobiles que Roland D'Ieteren risque de manquer le plus.